LA COLONISATION et L’EXPLOITATION DE LA MAIN-D'ŒUVRE INDIGÈNE EN AFRIQUE NOIRE

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LA COLONISATION et L’EXPLOITATION DE LA MAIN-D'ŒUVRE INDIGÈNE EN AFRIQUE NOIRE

   « … Il y a des territoires où 40 %, et, dans l’un d'eux, 50 %, de la totalité des hommes de13 à 35 ans sont au service des Européens. Il est permis de comparer le sacrifice imposé à la population congolaise par l’activité européenne à celui que représenterait l’alimentation pour un peuple de 10 millions d'âmes d’une armée de 200 000 hommes perpétuellement en campagne. On décime la population du Kwango. Les malades se sauvent, ils meurent dans la brousse, dans les villages… Cette population est terrorisée, elle verse dans le marasme… Dans les Uélés, 75 % des hommes se retirent dans la forêt. 50 000 indigènes sont passés en Ouganda. »

Pierre Orts, ministre plénipotentiaire, Le Congo belge, 1928.

   « Des migrations de travailleurs sont à prévoir. La Haute-Volta offre un réservoir abondant de main-d'œuvre où l’on pourra puiser. »

Albert Sarrault, La mise en valeur des colonies françaises, Payot, Paris, 1923.

   La construction du chemin de fer Congo-Océan, de Brazzaville, a coûté, pour les 140 premiers kilomètres 17 000 cadavres. Le reporter Albert Londres a décrit les atrocités de cette chasse à l'homme sur une région de plus de 1000 kilomètres :  

« … J'ai vu construire des chemins de fer. On rencontrait du matériel sur les chantiers. Ici, que des nègres! Le nègre remplaçait la machine, le camion, la grue. Épuisés, maltraités par les capitans, loin de toute surveillance européenne, blêmes, amaigris, désolés, les nègres mouraient en masse. Les 8000 hommes ne furent bientôt plus que 5000, 4000 puis 2000... Il fallut remplacer les morts, recruter derechef… Comme les indigènes se dérobaient au recrutement, on en arriva aux représailles. Des villages entiers furent punis. Enfin, pour masquer le dépeuplement, on parla de rectifier la frontière de l'Oubangui- Chari !

   Les chalands auraient pu s'appeler des corbillards et les chantiers des fosses communes. Le détachement de Gribingui perdait 75 %, de son effectif. Celui de Likonala-Massaka, comprenant 1250 hommes, n’en vit revenir que 429.

   D'Ouesso, sur le Sanga, partirent 174 hommes, 80 arrivèrent à Brazzaville, 69 sur le chantier. Trois mois après, il en restait 36. »

Albert Londres, Terre d'ébène. Albin Michel, Paris, 1929.

   « Depuis trois ans 1, 600 000 indigènes sont passés en Gold Coast, 2 millions d’indigènes sont partis au Nigéria, 10 000 vivent hors des villages à l’état sauvage dans les forêts de la Côte d’Ivoire. Ils fuient le recrutement pour l’armée, le recrutement pour les routes ou la machine (chemins de fer), le recrutement individuel des coupeurs de bois. C'est l'exode.

Albert Londres, ibid.

   « Je suis arrivé à Brazzaville en août 1920. Quelques semaines auparavant une « tournée de police » avait, d'après le journal de route des officiers la commandant, exterminé 528 indigènes, hommes, femmes et enfants.

Cette hécatombe n'avait ému personne, ni le gouverneur de la colonie ni le gouverneur général intérimaire, ni le général commandant supérieur des troupes. Bien au contraire les autorités militaires demandaient au ministère de la Guerre des récompenses pour les officiers ayant commandé cette tuerie. »

Victor Augagneur, gouverneur général des colonies, Erreurs et brutalités coloniales.

Textes cités par Jacques Arnault, Procès du colonialisme, 1958 ou publiés dans Démocratie nouvelle, mai 1951.

1. Écrit en 1928.

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